Dans un monde du travail en pleine transformation, les managers doivent repenser leur manière de communiquer. Parmi les soft skills à mobiliser, l’écoute active occupe une place centrale. Plus qu’une simple technique, elle constitue une véritable posture managériale, fondée sur l’attention, l’empathie et la bienveillance. Plusieurs recherches montrent que les collaborateurs se sentent davantage engagés et sécurisés lorsqu’ils perçoivent une écoute attentive de la part de leur manager.
Alors, qu’est-ce que l’écoute active, pourquoi est-elle essentielle en entreprise et comment la développer ?
L’écoute active est une manière d’écouter qui va bien au-delà du simple fait d’entendre. Elle repose sur une approche centrée sur la personne. Ainsi, l’écoute active consiste à écouter avec empathie et curiosité, en cherchant à comprendre à la fois les faits et les émotions exprimées.1
Contrairement à une écoute « sélective » (comme celle de l’avocat, focalisé sur les contradictions), l’écoute active vise à accompagner l’autre dans la clarification de sa pensée. Elle est dite active, car l’écoutant s’implique : il pose des questions ouvertes, reformule, observe le langage non-verbal et crée un espace de confiance.
Lors d’une réunion d’équipe, un manager qui reformule les propos de ses collaborateurs pour vérifier sa compréhension illustre une pratique claire d’écoute active. Dans un échange individuel, un collaborateur qui pose des questions ouvertes et invite son interlocuteur à préciser ses idées démontre une attention réelle au message reçu.
Sur le plan verbal, l’usage de mots encourageants comme « je comprends », « c’est intéressant » ou « peux-tu préciser ? » favorise la confiance et la fluidité des échanges. Enfin, le non-verbal et le paraverbal renforcent cette posture : maintenir un contact visuel, hocher la tête, adopter une posture ouverte et utiliser un ton chaleureux confirment l’intérêt porté à l’autre et accroissent l’impact relationnel de l’écoute.
L’écoute active se révèle être un processus complexe et multidimensionnel, intégrant des composantes cognitives, affectives, empathiques et comportementales, validées par des recherches récentes. Une étude qualitative menée auprès d’étudiants académiquement performants distingue des stratégies d’écoute organisées autour de trois axes :
Par ailleurs, le modèle de l’Active-Empathic Listening Scale (AELS)3, décline l’écoute empathique active en trois dimensions complémentaires :
Ces deux modèles, complémentaires, montrent que l’écoute active dépasse largement le fait d’« entendre », de questionner ou encore de reformuler. L’écoute active mobilise la pensée, l’émotion et le comportement pour créer une compréhension profonde et une relation de confiance.
Pourquoi démontrer de l’écoute active en tant que manager ou expert ?
L’une des principales missions du manager est de développer les compétences et l’autonomie de ses collaborateurs. L’écoute active permet de comprendre leurs besoins, aspirations et préoccupations, et de donner plus de sens à leur travail.
Selon une étude menée par Penn State University, les managers qui pratiquent l’écoute active contribuent à réduire le sentiment d’insécurité professionnelle, notamment en période de changement organisationnel. Cela améliore la confiance et diminue les risques psychosociaux.4
En laissant chacun s’exprimer et être entendu, l’écoute active stimule l’intelligence collective. Elle permet d’éviter les malentendus, de renforcer les liens entre collègues et de favoriser l’émergence de solutions innovantes.
La communication managériale inclut des échanges descendants (instructions), ascendants (retours des équipes) et horizontaux (collaboration entre pairs). Dans chacun de ces registres, l’écoute active joue un rôle central pour coordonner, motiver, comprendre et résoudre les conflits.
Comment développer son écoute active au travail ?
Une étude utilisant l’Active Listening Attitude Scale (ALAS) a démontré que même une courte formation peut améliorer significativement les compétences d’écoute des managers, surtout pour ceux qui avaient un niveau de départ faible.5
Reformuler les propos de l’autre avec ses propres mots et poser des questions ouvertes favorisent la compréhension mutuelle et la responsabilisation.
La pleine conscience entraîne la concentration et la régulation émotionnelle. Le silence, comme pratique volontaire en réunion, permet de ralentir et d’écouter avec une attention véritable.
Inspirée des travaux de Tania Singer, cette méthode consiste à améliorer son écoute active, en travaillant sur l’attention et la qualité relationnelle. En effet, l’empathie et la compassion renforcent la profondeur de l’écoute. Cela suppose d’abord de percevoir les émotions de l’autre en observant les signaux verbaux et non verbaux. Cette compréhension devient plus efficace lorsqu’elle s’accompagne de compassion, c’est-à-dire la volonté d’apporter un soutien concret. L’écoute active implique aussi une posture sans jugement et une attention bienveillante, qui permettent de rester pleinement présent et de transformer chaque échange en véritable levier relationnel.6
Développer son écoute, c’est considérer l’écoute active non seulement comme une technique mais aussi comme un geste professionnel à part entière. Identifier ses propres mécanismes, permet d’ajuster sa manière d’écouter. Éviter d’imposer ses interprétations personnelles garantit une écoute active neutre et efficace, au service de la communication et du leadership.7
1 Rogers, C. R., Farson, R. E., & Ivins, C. (2024). L’écoute active. Approche Centrée sur la Personne. Pratique et recherche, 34(1), 5-24.
2 Canpolat, M., Kuzu, S., Yıldırım, B., & Canpolat, S. (2015). Active listening strategies of academically successful university students. Eurasian Journal of Educational Research, 15(60), 163-180.
6 Singer, T., & Klimecki, O. M. (2014). Empathy and compassion. Current biology, 24(18), R875-R878.
7 Heyman, V. (2024). La puissance de l’écoute active. Cahiers pédagogiques, 590(1), 45-46.